Cela ne pouvait plus durer. Ça trottait dans sa tête depuis des mois et des mois. Elle les apercevait main la main dans les rues de Margaret River, changeait de direction pour ne pas affronter leur regard. A chaque fois, le pincement dans son cœur s’intensifiait. Et il n’avait jamais cessé d’augmenter depuis ce jour (…)

« Tu dis n’importe quoi, Billie. Tu sais très bien que je l’aime. Et il m’aime aussi, j’en suis sûre. Matthew est fait pour moi. Tu entends ? Je ne sais pas quel est ton problème. Peut-être es-tu jalouse ? Peut-être ne veux-tu pas mon bonheur ? Mais je pensais que tu étais mon amie. J’avais tort. Je ne veux plus te voir. »
Impuissante, Billie buvait ce que lui lança sa chère amie. Au fur et à mesure que les paroles s’écoulaient, son visage se décomposait. Elle s’en doutait, qu’Aloyssa n’allait pas bien le prendre. Mais c’était bien pire que tout ce qu’elle avait imaginé. Elle avait réfléchi longtemps à la meilleure façon d’annoncer ça à Aloyssa. En fin de compte, elle l’avait dit trop vite, trop brusquement, et elle avait blessé l’une des personnes les plus importante pour elle. Seulement, Billie souhaitait juste la protéger, et l’adolescente comme souvent, n’avait put se retenir de dire ce qu’elle avait sur le coeur. Si elle avait sût ce que cela provoquerait, elle l’aurait gardé pour elle. Elle aurait tout fait pour éviter de détruire cette amitié.
Dépitée, elle fixa Aloyssa alors qu’elle quittait la pièce en courant.
« Al’ ? Al’ ? AL' !»
La voix de la brunette tremblait et surtout il n’y avait absolument aucune chance que la concernée entende ses murmures, ses gémissements. Toujours assise, Billie resta un moment à regarder par la porte d’entrée, espérant peut-être que son (ex) amie revienne, que tout puisse s’arranger. Elle mit un bon moment à réaliser que jamais plus Aloyssa ne refranchirait cette porte. Elle s’allongea sur le canapé en fixant le plafond et resta ainsi jusqu’au soir, indifférente au fait que sa maison soit restée grande ouverte.

Mademoiselle Moore décida de mettre fin à ses intenses réflexions mentales qui l’empêchait de dormir tranquillement. Premièrement, il fallait que ses nuits soient complètes afin d’être totalement en forme pour son combat incessant contre les Gold Diggers. Deuxièmement, il n’était jamais trop tard pour réparer les morceaux cassés d’une forte amitié. Elle était celle qui avait tout brisé, elle serait celle qui réparerait. Pour se faire, elle commença par envoyer un SMS à Aloyssa. Un message court, simple mais explicite. Billie savait qu’Aloyssa allait accepter, peut-être, sûrement même qu'elle hésiterait, mais elle accepterait ce rendez vous. Cela ne l'empecha pas d'être soulagée lorsqu’elle reçut la réponse et le lieu de la rencontre. Il aurait été trop gênant qu’elles se parlent en tête à tête dans un lieu intime comme chez elles par exemple, Billie était certaine que son amie perdue pensait la même chose.
La jeune femme sortit de chez elle tranquillement à 14h, tout en sachant très bien qu’il lui faudrait cinq bonnes minutes pour arriver au Wild West. Elle traversa la plage pieds nus comme à son habitude, ses ballerines à la main, puis traversa le minuscule centre ville, déterminée. Le nombre de fois où elle avait poussé les portes du fameux saloon était incalculable. Ses visites se multipliaient d’ailleurs depuis l’arrivée des Gold Diggers en ville, c’était une excellente occasion d’en an arnaquer un ou deux afin de le pousser à quitter Margaret River. Une fois entrée, elle prit le temps de saluer Charlie et de lui souffler :
« Attend un peu avant d’envoyer quelqu’un nous servir, s’il te plait. » Elle lui fit un clin d’œil amical et se mit à chercher une jolie tête brune. Soudainement stressée, elle envisagea la possibilité qu’elle ne soit pas venue, et le cœur de Billie se recroquevilla. Sous l’œil curieux de Charlie, elle souffla de soulagement en l'a repérant et s’élança vers la table du milieu.
Billie s’arrêta une fraction de seconde, debout près d’Aloyssa. Elle sembla hésiter, puis s’assit face à elle. Des yeux en amandes se levèrent finalement vers les siens, et les lèvres de Billie s’élargirent pour former un de ses fameux sourires communicatif. Sincère.
« Bonjour Al… » Elle faillit s'interrompre. Même des années après, elle était toujours habituée à l’appeler par son diminutif. « Aloyssa. Merci d’être venue. » Elle posa son sac près d’elle et observa Aloyssa durant quelques secondes, qui visiblement n’osait pas ou ne souhaitait pas la regarder dans les yeux. Cela faisait tellement longtemps qu’elle ne l’avait pas vu d’aussi près… Billie humidifia ses lèvres, posa les mains sur la table.
« Ca me fait tellement plaisir de te voir, si tu savais. »
Elle ramena ses mains à elle et guettait la réaction d’Aloyssa. Elle ne s’attendait ni à ce qu’elle dise que c’était réciproque, ni a une explosion de joie, de colère ou autre. A vrai dire, elle ne s’attendait à rien. Elle regarda rapidement autour d’elle et ne vit que des visages inconnus de costauds venus pour l’or. Enfin, elle reprit, après avoir passé la main dans ses cheveux.
« Bon, je sais que tu te poses des questions. Plutôt du genre ‘Mais qu’est-ce qu’elle me veut celle-là ?!’ Rassures toi, je ne te veux rien de mal et je ne veux pas t’emprunter de l’argent. »
Elle ricana brièvement. Elle continua, le ton plus sérieux.
« En réalité, j’ai pensé qu’il était peut-être temps de remettre les compteurs à zéro. Un nouveau départ, je ne sais pas. » Elle déglutit. « Tu m’as manqué Aloyssa. »